L’enfant au cœur de tout : le chaos apprivoisé
Edi Dubien, né en 1963, porte en lui les stigmates d’une enfance marquée par la violence. Pas de mièvrerie ici, ses portraits d’enfants mélancoliques traduisent une quête viscérale : comprendre, digérer, et renaître. « Évidemment, la figure de l’enfant est centrale, il s’agit aussi de l’homme qui se réalise venant du chaos », confie-t-il.
Ses œuvres, quelque part entre l’autoportrait et l’exorcisme, racontent les silences lourds et les cris étouffés d’une jeunesse tourmentée. C’est beau, c’est fragile, et ça vous colle une claque.
Identité et genre : rébellion douce mais farouche
Dans un monde où les identités sont souvent rangées dans des cases trop petites, Dubien aborde le genre et l’assignation avec une finesse désarmante. Ses personnages, androgynes, éthérés, incarnent une résistance silencieuse face aux diktats. Ici, pas besoin de slogans : chaque trait de crayon, chaque coup de pinceau est un manifeste.
C’est comme si Dubien nous murmurait : « Soyez ce que vous voulez, la beauté réside dans le mouvement. »
La nature comme sanctuaire et métamorphose
Impossible de parler d’Edi Dubien sans évoquer la nature. Pas la nature carte postale, mais une nature viscérale, complice, presque maternelle. Les animaux, souvent anthropomorphiques, deviennent des doubles de l’artiste. On pense à des contes comme Peau d’Âne, où les bois abritent les âmes égarées.
Et que dire des végétaux ? Chez Dubien, ils ne sont pas des décors, mais des personnages à part entière. Chaque feuille, chaque branche semble chuchoter une vérité universelle : la nature est transformation, résilience, réconciliation.
Une rétrospective hors du commun
Avec plus de 200 œuvres – peintures, dessins, sculptures et installations – cette exposition est une plongée totale dans l’univers d’Edi Dubien. Le Musée de la Chasse et de la Nature, avec ses animaux empaillés et ses boiseries du XVIIIe siècle, offre un écrin parfait à cette exploration. Une conversation s’installe entre passé et présent, réel et imaginaire.
Rémy Provendier-Commenne, commissaire de l’exposition, a su créer une mise en scène aussi intime que spectaculaire. Le spectateur devient un explorateur, déambulant entre des fragments de vie et des éclats de rêve.
Pourquoi Dubien parle à notre époque
Dans un monde qui hurle à l’unisson mais n’écoute jamais, les œuvres de Dubien sont des chuchotements qui résonnent. Elles disent la douleur de ne pas être compris, mais aussi l’espoir de trouver sa place. Elles parlent de nous, de nos doutes, de nos fragilités.
Edi Dubien ne prétend pas avoir les réponses, mais il pose les bonnes questions. Et c’est peut-être ça, l’art véritable : un miroir qui reflète, non pas ce que nous voulons voir, mais ce que nous sommes vraiment.
L’exposition d’Edi Dubien, c’est bien plus qu’une simple sortie culturelle. C’est une invitation à ralentir, à ressentir, et peut-être, à se réconcilier avec soi-même. Un antidote poétique à l’indifférence ambiante, qui prouve que l’art peut encore éclairer nos zones d’ombre.