par | 5 Sep 2024 à 15:09

Le revival du vinyle à Paris : un coup de bluff ou une vraie révolution culturelle ?

Dans une époque où l'on télécharge des albums en un clic et où Spotify nous sert nos morceaux préférés sur un plateau d'argent numérique, le retour en force du vinyle peut sembler anachronique, voire ironique. Pourtant, voilà que le Vinyl Club débarque à Paris, dans l'ambiance feutrée d'un hôtel cossu, et nous promet des soirées DJ « à l'esprit vintage ». Alors, le vinyle : retour sincère aux racines musicales ou simple posture branchée ?
Temps de lecture : 3 minutes

vinyle, mon amour : le snobisme de la nostalgie

On le sait tous : le vinyle n’est pas seulement un format musical, c’est un statement. Quand vous dégainez votre LP de Bowie ou de Gainsbourg lors d’une soirée, vous ne dites pas seulement « J’aime la musique ». Vous clamez haut et fort « J’aime la VRAIE musique », celle qui craque, qui grésille, celle qui, prétendument, a une « âme ». Comme si le fait d’entendre des petits pops et des craquements ajoutait une sorte de cachet mystique à un riff de guitare.

Mais soyons honnêtes, combien d’entre nous sont vraiment capables de faire la différence entre un bon vieux disque en vinyle et sa version numérique ? Très peu, à moins d’avoir un système Hi-Fi à faire pâlir d’envie le studio d’enregistrement d’Abbey Road. Alors pourquoi ce retour en force ? Peut-être parce qu’on est tous un peu nostalgiques d’une époque qu’on n’a pas connue. Peut-être parce que ça donne un petit air savant de dire qu’on préfère le son « chaud » du vinyle, même si, soyons francs, 90% d’entre nous l’écoutent sur une platine à 50 balles achetée chez Fnac.

l’hôtel bohème ou comment marketer la coolitude

Le Vinyl Club, avec ses soirées DJ, s’inscrit dans cette tendance du vintage revisité, saupoudré d’un peu de paillettes pour le rendre encore plus séduisant. Imaginez un peu : vous entrez dans un hôtel chic du 16e arrondissement, décoré avec des affiches d’époque, des banquettes en velours, et des lumières tamisées qui vous donnent l’impression d’être dans un speakeasy des années 70. Dans un coin, un DJ tout droit sorti d’un magazine de mode fait tourner des disques sous vos yeux émerveillés. Une main sur sa platine, l’autre tenant son verre de whisky, il vous donne l’illusion d’un retour à l’âge d’or du son analogique.

Mais est-ce que ce genre de soirée est vraiment authentique ? Ou bien est-ce une simple façon de capitaliser sur l’engouement hipster pour le rétro ? On pourrait penser qu’en cherchant à recréer cette ambiance des années passées, on efface tout ce qui faisait la richesse culturelle de l’époque, pour ne garder que la surface. Un peu comme un vinyle rayé qu’on passe en boucle pour impressionner la galerie.

entre authenticité et marketing, où est la ligne ?

Pour les puristes, les amoureux de la musique avec un grand M, ces soirées peuvent sembler être une trahison. Elles ne sont qu’une autre manifestation de ce que le philosophe Mark Fisher appelait le réalisme capitaliste : une appropriation d’une sous-culture pour en faire une marchandise. Pourtant, même le plus ardent critique admettra que la résurgence du vinyle permet de rassembler les gens autour d’un amour commun de la musique.

Parce qu’au fond, c’est peut-être ça le plus important : l’expérience partagée. On ne va pas à une soirée vinyle pour écouter de la musique de la meilleure qualité possible – pour ça, il y a des casques Bose et des abonnements Tidal HiFi. Non, on y va pour ressentir cette connexion humaine, ce petit frisson qu’on ressent quand le DJ enchaîne votre morceau préféré avec un tube oublié des années 80. Et ça, Spotify ne pourra jamais le recréer.

pourquoi il faut y aller (ou pas)

Le Vinyl Club vous intrigue ? Allez-y, mais allez-y avec les bonnes attentes. Ne cherchez pas l’authenticité absolue ni une plongée dans l’histoire musicale. Prenez-le comme une soirée entre amis, un prétexte pour enfiler votre veste vintage chinée aux puces de Clignancourt, pour boire un verre et vous laisser emporter par l’ambiance.

Et si ce genre d’événement vous hérisse le poil ? Si vous voyez dans le revival du vinyle une récupération pure et simple de la contre-culture des années passées ? C’est bien aussi. Continuez à collectionner vos disques, à polir vos pochettes comme des reliques, et à vous moquer des DJ « vintage » qui jouent à se donner un genre. Après tout, la musique, c’est aussi ça : un terrain de bataille idéologique où chacun défend sa vision de ce qu’elle devrait être.

Ce qui est sûr, c’est que le débat est loin d’être clos. Et c’est peut-être mieux ainsi. Parce que tant qu’on en parle, tant qu’on débat et qu’on échange, c’est que le vinyle – et la musique en général – continue de nous faire vibrer, et ça, personne ne pourra jamais nous l’enlever.

Thomas

Tom, rédacteur passionné chez ANousParis 🖋️. Je couvre toute l’actu parisienne – culture, événements, et tendances de la Ville Lumière! 🗼