par | 30 Juil 2025

Handala : quand la République gronde pour Gaza

Tu croyais Paris en vacances ? Manqué. Mardi soir, la Place de la République a débordé comme une pinte renversée : plus de 300 voix ont scandé « Free Handala ! » pour exiger la libération de militants propalestiniens coincés derrière les barreaux israéliens. Pas un chill estival, mais un cri brut, épicé de fumigènes rouges et de keffiehs qui claquent. Le décor : fontaines coupées, sirènes en fond, pancartes dessinées sur des cartons d’iPhone — la version 2025 du pavé de Mai 68.
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Paris crie Gaza encore

La foule bigarrée, nourrie d’étudiants en break de stage, de soixante‑huitards recyclés et de TikTokeurs assoiffés de contenu, a planté ses banderoles dès 19 h. Au micro, la députée Gabrielle Cathala a cogné sec : « Pas question de rester muets face à un massacre », envoyant valser la diplomatie feutrée de l’Élysée. À ses côtés, des collectifs d’aide humanitaire rappelaient que chaque minute en détention prolonge le cauchemar de Gaza, où les compteurs de famine tournent plus vite qu’un compteur Linky en surcharge.

Un navire, vingt et un visages, huit toujours retenus

Le cœur de la colère ? Le Handala, voilier affrété par la Freedom Flotilla Coalition pour livrer 800 kg de lait infantile, médocs et riz, fauché en plein grand bleu par la marine israélienne le 27 juillet. À bord : 21 activistes venus de dix pays — médecins, ingénieurs, journalistes, élus. Israël a débarqué tout le monde au port d’Ashdod et proposé un « ticket retour » express. Treize ont plié sous la menace d’expulsion, mais huit bravent toujours les cellules de la prison de Givon, selon l’ONG Adalah.

Le Handala, gosse en haillons qui nargue les puissants

Si le bateau porte ce nom, ce n’est pas pour le branding. Handala, c’est le gamin en guenilles créé par le caricaturiste Naji al‑Ali : dos tourné, mains derrière le dos, promesse de ne se retourner que lorsque la Palestine sera libre. Symbole insubmersible, il colle partout : graffitis de Belleville, stickers sur les laptops d’étudiants en design, T‑shirt de rappeur éco‑conscient. Renommer le navire ainsi, c’est coller un majeur artistique au blocus et rappeler que la poésie visuelle peut foutre la migraine aux ministères.

Deux députées libérées, un Quai d’Orsay aux abonnés absents

Les élues LFI Emma Fourreau et Gabrielle Cathala ont, elles, regagné Paris — épuisées, amochées, mais libres. Fourreau, qui avait entamé une grève de la faim de quarante‑huit heures, dénonçait déjà l’attitude « médiévale » des geôliers israéliens. Cathala, à peine posée à Roissy, a fustigé un exécutif français « pas à la hauteur ». En langage traduit : Macron préfère compter les points dans les sondages que taper du poing pour rapatrier les otages politiques.

Chris Smalls et la diplomatie du poing

Parmi les captifs, la pop‑culture a trouvé son héros malgré lui : Chris Smalls, charismatique syndicaliste d’Amazon US. Il raconte avoir été étranglé et rué de coups dès la passerelle, traitement apparemment « réservé au seul passager noir ». Pendant que Washington cligne des yeux façon « qui, moi ? », Smalls incarne le croisement improbable entre luttes ouvrières et solidarité palestinienne. Si Marvel cherche un nouveau script, qu’ils appellent.

Le blocus en chiffres, la honte en stéréo

Israël impose depuis mars 2025 un blocus quasi total ; l’ONU classe la situation en « famine d’ampleur historique », près de deux millions de personnes sous l’indice calorique de survie. Le Handala succède au Madleen, arraisonné le 9 juin avec, à son bord, Greta Thunberg et douze autres militants, expulsés manu militari. Chaque interception ajoute une couche de jurisprudence bancale où le droit maritime ressemble à un Rubik’s Cube froissé.

Pourquoi ça te concerne, même si ton écran est plein

Toi qui scrolles ce papier entre deux pubs pour sneakers rétro, sache qu’un navire pirate de l’humanitaire raconte aussi notre génération : hyper‑connectée, allergique aux injustices en 4K. On s’envoie des stories de frappucinos, mais on envoie aussi des bateaux bourrés de biberons à travers des barrages militaires. Le frisson collectif de la République en transe, c’est le rappel que Paris peut encore sortir de sa torpeur gentrifiée pour gronder à l’unisson.

Alors la prochaine fois que tu passes place de la République, mate la statue : elle a entendu plus de cris qu’un pogo de métal. Et quand tu verras un sticker du petit Handala sur un abribus, souviens‑toi de ces huit prisonniers qui regardent le plafond d’une cellule au lieu des vagues de Gaza. Si l’oisiveté est un luxe, l’indifférence est un naufrage — à toi de voir si tu veux couler ou ramer.

Tom, rédacteur passionné chez ANousParis 🖋️. Je couvre toute l'actu parisienne - culture, événements, et tendances de la Ville Lumière! 🗼