L’invasion tranquille des flèches rouges sur la voie royale
Le 16 juin 2024, Trenitalia lance ses quatre allers-retours quotidiens sur la ligne qui relie Paris à Marseille. Ils débarquent avec leur arme fatale, les Frecciarossa 1000, ces rames à grande vitesse flambant neuves, qui peuvent embarquer jusqu’à 457 passagers, et même doubler cette capacité lors des pics de fréquentation. Oui, on parle bien de rames doubles, ce qui n’est pas rien pour le marché français où la SNCF règne sans partage depuis la mise en service du TGV en 2001.
Le trajet se fait avec quelques étapes bien choisies : Lyon-Saint-Exupéry, Avignon et Aix-TGV, histoire de ne pas laisser sur le quai ceux qui veulent un peu plus que juste la capitale et la Méditerranée. Attention toutefois, les promesses de vitesse font un peu la grimace : si certains trains peuvent réduire le parcours à 3h20, d’autres mettront un peu plus de temps, jusqu’à 4h06. Pas très homogene, tout ça.
SNCF : le roi sur son trône ou le roi menacé ?
La SNCF ne compte pas laisser filer le gâteau sans riposter. Le transporteur historique aligne près de 17 à 18 TGV par jour, entre ses services premium Inoui et ses Ouigo discount. Mais à court terme, pas de baisse des fréquences, ni d’ajustement spectaculaire face au nouvel entrant. Leur plan secret ? Miser sur la complémentarité entre les offres économiques et les services premium, ainsi que sur leur amplitude horaire — une stratégie qui, sur le papier, peut tenir la route.
L’armada de nouveaux TGV M d’Alstom, censée révolutionner la ligne, n’arrivera qu’en 2026, doucement, sûrement. En attendant, la SNCF traîne un peu des pieds sur la modernisation de sa première classe, censée monter en gamme mais qui tarde à voir le jour. On sent que ça coince.
Le prix : la vraie arme de Trenitalia
Sur le papier, c’est là que Trenitalia compte faire la différence. Avec des billets à partir de 27 euros en seconde classe et 37 euros en première, la compagnie italienne joue la carte du tarif agressif, un vrai coup de pied dans la fourmilière. Ce luxe de pouvoir casser les prix, c’est grâce à une réduction massive des péages ferroviaires consentie par SNCF Réseau — oui, vous avez bien lu, la maison mère SNCF accorde une ristourne allant jusqu’à 38 % en 2025 pour encourager la concurrence.
Pas étonnant que les syndicats SNCF fassent la grimace, dénonçant un cadeau d’environ 30 millions d’euros qui pourrait plutôt servir à améliorer le réseau vieillissant. L’ironie ultime : c’est un composant du groupe SNCF qui finance son propre concurrent. Bienvenue dans la schizophrénie ferroviaire française.
Où est Renfe, le troisième larron espagnol ?
Pendant que Trenitalia joue des coudes, l’Espagnol Renfe, avec ses Talgo, fait du surplace. Bloqué par des problèmes techniques et d’homologation, son projet Paris-Marseille est devenu un fantôme, sans aucune date claire de lancement. Certains murmures dans la presse ibérique parlent même d’un abandon total du marché français. Dommage, ça aurait pimenté un peu plus cette guerre des rails.
Une vraie bataille ou juste un remake poli ?
Les experts du transport s’accordent à dire que cette arrivée ne va pas déclencher une guerre fratricide sanglante entre SNCF et Trenitalia, mais plutôt agrandir le gâteau ferroviaire. Un sondage Trainline révèle que près de 60 % des Parisiens et Marseillais sont prêts à prendre plus souvent le train, encouragés par cette nouvelle offre. La grande gagnante ? La planète, si on arrive à faire sauter la voiture et l’avion du podium.
Toutefois, un problème demeure : Trenitalia n’est pas accessible via SNCF Connect, la plateforme de réservation la plus utilisée en France. Il faut passer par des services tiers comme Trainline ou Kombo, ce qui ne facilite pas la vie des voyageurs un peu feignants. Une barrière technologique qu’il va falloir sauter rapidement.
La petite révolution qui sent bon l’Italie
Je ne vais pas vous mentir, voir l’Italien débarquer sur cette ligne historique, c’est un petit vent de fraîcheur que l’on n’attendait pas forcément. La SNCF, avec son confort confortable et ses prix parfois trop élevés, avait un peu laissé s’endormir le marché. Trenitalia, c’est le grain de sel, le petit coup de fouet dans cette routine trop bien rodée.
Entre les horaires mieux pensés, les tarifs qui donnent envie de lâcher la voiture, et cette touche d’Italie flamboyante qui fait rêver, ce nouveau concurrent va forcer la SNCF à se bouger. Et pour nous, voyageurs urbains, c’est plutôt une bonne nouvelle. Parce qu’au final, ce qu’on veut, c’est un train rapide, accessible, et qui ne vous ruine pas.
Alors oui, la ligne Paris-Marseille ne va pas changer du tout au tout du jour au lendemain, mais c’est le début d’un remaniement sérieux qui pourrait bien secouer le cocotier. Et si vous êtes du genre à kiffer les expériences qui sortent de l’ordinaire, testez cette aventure ferroviaire made in Italy — ça a le goût du voyage et ça fait du bien à l’ego du voyageur.