Entre démissions, divisions et incertitudes institutionnelles
Paris, octobre 2025. — Le gouvernement français traverse une période d’instabilité politique sans précédent depuis le début du second quinquennat d’Emmanuel Macron. L’exécutif se retrouve affaibli, secoué par des départs successifs, des divisions internes et un climat institutionnel tendu. Au centre de cette tourmente, la question de la légitimité du pouvoir et la recherche d’une nouvelle majorité politique dominent le débat.
Une série de ruptures politiques au sommet de l’État
La semaine dernière, la scène politique française a été marquée par la démission de Sébastien Lecornu, Premier ministre depuis moins d’un mois. Ce départ, survenu après un échec dans la formation d’un gouvernement stable, illustre la fragilité de la majorité présidentielle. Selon plusieurs sources parlementaires, les négociations avec le centre-droit et les écologistes n’ont pas permis de dégager de coalition durable.
Cette situation fait suite à plusieurs mois de tensions au sein du camp présidentiel. L’ancien Premier ministre Gabriel Attal a exprimé publiquement son désaccord sur la stratégie politique de l’exécutif. De son côté, Édouard Philippe, fondateur d’Horizons, a appelé à une “clarification du pouvoir” et, selon plusieurs proches, envisagerait une recomposition politique à moyen terme.
L’exécutif face à une impasse institutionnelle
À l’Élysée, la priorité reste de nommer rapidement un nouveau Premier ministre. Le président Emmanuel Macron s’entretient avec plusieurs personnalités issues du centre et de la droite modérée pour tenter de reconstruire un socle de confiance. Des noms circulent, parmi lesquels ceux de Franck Riester, Florence Parly ou encore Jean-François Carenco.
Mais la tâche s’annonce difficile. Depuis la dissolution partielle de juin 2024, l’Assemblée nationale est fragmentée. Aucun bloc ne détient de majorité absolue. Les alliances de circonstance sont devenues la norme, rendant la gouvernance de plus en plus instable. Cette situation complique l’adoption du budget 2026, dont l’examen doit débuter dans les prochaines semaines.
Un Parlement divisé et sous tension
À l’Assemblée nationale, les débats se sont durcis. Les groupes d’opposition — qu’ils soient issus de la Nupes, du Rassemblement national ou des Républicains — multiplient les amendements et les motions de censure. Les séances nocturnes s’enchaînent, souvent marquées par des interruptions et des invectives.
Dans ce contexte, la question du recours à l’article 49.3 de la Constitution plane à nouveau. Bien que controversé, cet outil reste l’un des rares leviers permettant au gouvernement de faire adopter un texte sans vote. Cependant, la perspective d’un nouvel usage de cet article ravive le souvenir des crises sociales de 2023 et 2024, notamment lors des réformes sur les retraites et le travail.
Les conséquences économiques et diplomatiques
Cette crise politique interne intervient alors que la France traverse une période d’incertitude économique. Les prévisions de croissance pour 2026 ont été révisées à la baisse par la Banque de France. L’inflation, bien que stabilisée autour de 3 %, continue d’affecter le pouvoir d’achat des ménages.
Sur le plan européen, plusieurs observateurs s’inquiètent de la capacité de la France à tenir ses engagements budgétaires. La présidente de la BCE, Christine Lagarde, a rappelé que la stabilité politique constituait “une condition essentielle” à la crédibilité économique du pays. À Bruxelles, certains diplomates évoquent déjà un “affaiblissement de la voix française” dans les discussions sur la réforme du pacte de stabilité.
À Paris, une recomposition politique en cours
Dans la capitale, cette crise nationale a des répercussions directes. Plusieurs élus parisiens de la majorité présidentielle ont exprimé leurs doutes sur l’avenir du mouvement Renaissance. Certains, comme Sabrina Agresti-Roubache ou Stanislas Guerini, plaident pour un repositionnement plus local et une campagne municipale recentrée sur les enjeux urbains : logement, sécurité et écologie.
La droite parisienne, emmenée par Rachida Dati et Michel Barnier, profite de cette fragilité pour renforcer son implantation. Les Républicains espèrent convertir cette dynamique en vue des élections municipales de 2026. Du côté de la gauche, la Nupes tente de maintenir un front uni, malgré les divergences internes entre socialistes et écologistes.
Une opinion publique en perte de confiance
Les derniers sondages publiés montrent un recul de la confiance envers le gouvernement. Moins de 25 % des Français estiment que l’exécutif est en mesure de “redresser la situation politique”. À l’inverse, 61 % jugent que le pays “s’enlise dans une crise institutionnelle durable”.
Cette défiance s’exprime également dans les manifestations organisées à Paris et dans plusieurs grandes villes de province. Les syndicats, bien que discrets ces derniers mois, envisagent une reprise de la mobilisation sociale si les réformes budgétaires venaient à menacer les services publics.
Vers une recomposition politique ?
Face à cette impasse, plusieurs hypothèses sont désormais sur la table : un remaniement profond, la formation d’un gouvernement d’union nationale ou, à plus long terme, une dissolution anticipée de l’Assemblée. L’exécutif cherche à gagner du temps, mais le calendrier institutionnel s’impose.
Dans les prochains mois, le vote du budget 2026, les élections partielles prévues à Paris et les discussions sur la réforme du logement pourraient accélérer les décisions. L’enjeu n’est plus seulement la survie d’un gouvernement, mais la stabilité du cadre politique de la Cinquième République.
Une fragilité institutionnelle
La France traverse une phase de fragilité institutionnelle. Les équilibres politiques établis depuis 2017 se fissurent, laissant place à un champ politique en recomposition. À Paris, cette instabilité se traduit par une intensification des luttes d’influence et un climat de défiance généralisé.
L’avenir immédiat dépendra de la capacité de l’exécutif à restaurer la confiance, à bâtir des compromis et à maintenir la continuité de l’État dans une période où la légitimité du pouvoir semble plus que jamais questionnée.