la plume d’un politique ou d’une machine ?
Jordan Bardella qui publie un livre, c’est un peu comme si on apprenait que le Père Noël avait un compte OnlyFans. C’est inattendu, mais pas complètement impossible. Ce qui intrigue davantage ici, c’est la manière dont cette publication s’inscrit dans un jeu d’échecs médiatique. Bardella a toujours été le « minot » sur qui tout le monde mise pour succéder à Marine Le Pen. Il fallait bien qu’il muscle un peu son image en publiant son manifeste idéologique.
Mais alors, est-ce vraiment Bardella qui tient la plume ? Ou bien Fayard, maison d’édition qui ne cesse de défrayer la chronique depuis son rachat par Bolloré, est-elle la main invisible derrière ce petit coup de maître ? C’est ici que la machine Bolloré se met en marche. Depuis des années, l’homme d’affaires breton a su tisser un réseau médiatique tellement vaste qu’il pourrait pratiquement postuler pour un rôle dans une dystopie orwellienne. Il a un journal, une chaîne d’info, des maisons d’édition. Bref, de quoi modeler l’opinion publique comme un boulanger pétrit une baguette.
du contenu politique à la sauce mainstream
Soyons clairs, le livre de Bardella n’a rien de révolutionnaire. C’est une énième tentative d’élever un discours politique nauséabond dans la stratosphère du débat respectable. Mais le véritable coup de génie, ou plutôt de génie maléfique, c’est d’avoir choisi une maison d’édition comme Fayard pour la sortie. Pourquoi ? Parce que cela donne une légitimité à un contenu qui, autrement, aurait peut-être pris la poussière sur les étagères des librairies radicales de quartier.
Le nom de Fayard évoque une certaine tradition intellectuelle, un héritage de grands penseurs. Alors imaginez l’impact d’associer ce blason à un jeune loup politique qui ambitionne de devenir le prochain roi de France. C’est un coup marketing d’une efficacité redoutable. Et oui, c’est ici que la machine Bolloré opère : elle ne se contente pas de publier, elle façonne l’image. Elle sait que la crédibilité est l’arme ultime.
une jeunesse désillusionnée ou manipulée ?
Ce qui est fascinant ici, c’est l’ambition de Bardella de capter la jeunesse. Oui, vous avez bien lu. Le jeune électorat, souvent considéré comme volage et dépolitisé, devient soudainement une cible. Et pourquoi pas ? Avec son visage d’ado à peine sorti de l’acné, Bardella pourrait passer pour un influenceur lifestyle sur Insta. Il aurait même pu vendre des codes promos pour des thés détox si sa carrière politique n’avait pas décollé si vite.
Mais là encore, l’ombre de Bolloré plane. Le patron breton a une obsession, celle de remodeler l’espace médiatique et politique pour que tout aille dans son sens. Un sens qui, bien sûr, tend vers une droite dure, conservatrice, et franchement puante. Alors, quand Bardella vise les jeunes, il le fait avec des outils modernes, des stratégies empruntées aux pires marketeux de la Silicon Valley, mais toujours sous l’œil vigilant de son parrain Bolloré.
un livre ou une bombe médiatique ?
Finalement, ce livre est moins un manifeste politique qu’une bombe médiatique. Son objectif n’est pas tant de convaincre avec des arguments que de conquérir des esprits avec des slogans. C’est là la force de cette nouvelle génération politique : moins d’idées, plus de stratégie. On ne cherche plus à convaincre, on cherche à séduire, à hypnotiser, à manipuler. Et c’est pour ça que la machine Bolloré est redoutable. Elle ne produit pas seulement du contenu, elle produit du contrôle.
ce qu’on ne nous dit pas
Mais ce qui est peut-être le plus ironique, c’est que toute cette manœuvre se fait sous couvert de « transparence ». Bardella se présente comme un jeune politique de terrain, proche des « vraies » gens, loin des élites parisiennes. Et pourtant, le voilà, bras dessus bras dessous avec les plus grandes fortunes du pays, utilisant les mêmes techniques de manipulation médiatique que ceux qu’il prétend combattre. Vous y croyez, vous ? Moi, pas du tout.
Et c’est là tout le cynisme de l’époque. On peut prétendre être anti-système tout en devenant une pièce maîtresse de ce même système.