par | 30 Déc 2024 à 11:12

L’art est dans la rue : quand les affiches prennent d’assaut Paris

Du 18 mars au 6 juillet 2025, le Musée d’Orsay ouvre grand ses portes pour “L’art est dans la rue”, une exposition qui s’attaque au phénomène explosif des affiches illustrées dans la Paris du XIXe siècle. Enfin, l’art urbain d’antan sort des oubliettes pour se pavaner dans un musée prestigieux. Ironique ? Peut-être. Mais quand il s’agit de Toulouse-Lautrec et compagnie, on ferme les yeux sur l’hypocrisie et on plonge tête la première.
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L’affiche : l’Instagram du XIXe siècle

Imaginez Paris à la fin du XIXe siècle : des kiosques flambants neufs, des colonnes Morris qui poussent comme des champignons, et des murs fraîchement haussmannisés qui crient « affichez-moi ! ». Les images sont partout, du moindre recoin jusqu’aux corps des hommes-sandwichs. Oui, vous avez bien lu : des mecs littéralement transformés en panneaux publicitaires ambulants. L’affiche, c’est l’écran de smartphone de l’époque, un déferlement visuel qui capte le regard des passants avec autant d’efficacité qu’un scroll infini sur TikTok aujourd’hui.

Et pour cause : ces affiches sont signées par des pointures artistiques. Jules Chéret, alias « le roi de l’affiche », déboule avec ses explosions de couleurs et ses figures féminines légères comme des bulles de champagne. Derrière lui, des gars comme Toulouse-Lautrec, Steinlen ou Mucha transforment cette « pub de rue » en chef-d’œuvre. De la réclame pour des cabarets, des pièces de théâtre ou des marques de chocolat ? Oui, mais faites avec un sens artistique qui fait honte à nos campagnes de pub actuelles.

Paris, terrain de jeu ou machine à cash ?

Si aujourd’hui le street art est vendu à prix d’or dans des galeries, au XIXe siècle, l’affiche connaissait déjà un destin similaire. C’est là que l’“affichomanie” prend racine. Ces images que tout le monde peut voir gratuitement dans la rue deviennent des objets de collection. Les marchands d’estampes flairent le filon et transforment cette explosion visuelle en business juteux.

Mais ne soyons pas naïfs. Paris, capitale de la liberté artistique ? Pas si vite. Si l’affiche s’épanouit sur les murs, c’est parce qu’elle s’aligne avec l’esprit bourgeois de la Belle Époque : on veut de la légèreté, des cabarets, et une rue vidée de ses indigents et émeutiers. Bref, on cache la misère derrière des couleurs éclatantes et des slogans bien léchés.

L’exposition : un feu d’artifice ou un feu de paille ?

“L’art est dans la rue” promet un véritable tourbillon visuel avec près de 300 œuvres. Des affiches aux peintures en passant par des photographies et objets décoratifs, le tout veut nous plonger dans l’effervescence du Paris XIXe siècle.

Mais soyons honnêtes : voir des affiches de rue soigneusement encadrées dans un musée, c’est un peu comme déguster un hot-dog sous cloche en argent. L’affiche a toujours été un art accessible, immédiat et populaire. Lui coller une étiquette « chef-d’œuvre » ne serait-il pas une façon de l’enfermer dans une cage dorée ?

Cela dit, ce sera l’occasion parfaite de (re)découvrir les maîtres de ce genre explosif. Entre les arabesques sensuelles de Mucha et les ombres provocantes de Toulouse-Lautrec, il y a de quoi faire battre le cœur des amateurs d’art comme des néophytes.

L’affiche, ce miroir aux alouettes

À travers ces œuvres, l’exposition révèle les paradoxes d’une époque. Entre la rue grouillante de vie et les illusions d’une Belle Époque idéalisée, l’affiche devient un outil politique et social. Les milieux libertaires s’en emparent pour poser les premières pierres de l’affichage militant. Jules Grandjouan, pionnier du genre, invente un langage mural conçu pour frapper les esprits.

Mais soyons clairs : ce que vous verrez au Musée d’Orsay, ce ne sont pas ces affiches rebelles. Ce sont les images qui vendent du rêve, pas celles qui dénoncent la réalité crasse d’une société en pleine mutation.

Ce que la rue a encore à nous dire

Alors, pourquoi aller voir cette expo ? Parce que c’est un hommage à une époque où l’art n’avait pas peur de descendre dans la rue pour parler à tout le monde. Mais une fois votre visite terminée, sortez de la bulle dorée du musée et baladez-vous. La rue, aujourd’hui comme hier, reste un théâtre d’expression libre. Les affiches ont laissé place aux graffitis, mais le message est toujours là : un cri de révolte ou une promesse d’évasion, pour quiconque prend le temps de regarder.

Tom, rédacteur passionné chez ANousParis 🖋️. Je couvre toute l'actu parisienne - culture, événements, et tendances de la Ville Lumière! 🗼