Une Solution à la Cruauté?
L’idée germe en 2008 dans l’esprit tordu mais génial de deux cheffes d’entreprise. Face à une législation aussi stricte que la morale d’un censeur sur l’utilisation des vrais bébés en tournage, Cinébébé offre une alternative éthiquement discutable mais artistiquement révolutionnaire. « Entre trois mois et trois ans, un vrai bébé ne peut figurer qu’une heure par jour sur un plateau. Et franchement, qui voudrait mettre un bébé sur une moto ? », s’indigne Justine Ray Le Solliec, cogérante et visionnaire commerciale de Cinébébé. La réponse ? Personne. Mais tout le monde veut voir ce bébé sur une moto, du moins au cinéma.
Une Armée de Silicone
Chaque rejeton de Cinébébé, d’Auguste le nouveau-né à Arthur l’adolescent précoce, est sculpté avec un amour suspect et un souci du détail frôlant l’obsession. Virginie Dahmane, artiste et alchimiste de la plastiline, donne vie à ces êtres étrangement silencieux, inspirés de vrais nourrissons et de photos, dans une quête éperdue de réalisme. Le silicone, cette matière énigmatique, devient peau, chair, et illusion sous ses doigts experts.
Plus Qu’une Poupée
Mais Cinébébé ne s’arrête pas là. L’entreprise, dans une ambition démesurée ou une vision géniale, propose également des faux ventres pour simuler des accouchements à l’écran. Un système d’accouchement, avec un faux bassin féminin, permet de filmer la venue au monde d’un bébé de silicone, poussant l’illusion à son paroxysme. La question demeure : sommes-nous encore capables de distinguer le vrai du faux ?
Un Marché de la Fausseté ?
Avec près de 40 apparitions filmiques à leur actif en un an, ces bébés factices représentent plus qu’une prouesse technique ; ils sont le symbole d’une industrie cinématographique prête à tout pour capturer l’essence de la réalité, quitte à la fabriquer de toutes pièces. Cinébébé, en élargissant sa gamme à des prothèses de grossesse, ne se contente pas de brouiller les lignes entre fiction et réalité ; elle les redessine.
L’ironie de cette quête effrénée du réalisme est savoureuse. Dans un monde où l’authenticité est roi, le cinéma, cet art de l’illusion par excellence, trouve dans le faux bébé l’ultime trompe-l’œil. Cinébébé, par son ingéniosité et son audace, nous force à nous interroger : jusqu’où sommes-nous prêts à aller pour une image parfaite, pour un moment de vérité fabriqué ?
Alors, la prochaine fois que vous verrez un bébé à l’écran, demandez-vous s’il est l’œuvre de la nature ou de Cinébébé. Et si cette question vous perturbe, c’est que Cinébébé a déjà gagné.