Un coup de pouce ministériel inespéré
Longtemps réduite à un projet de couloir RER, l’extension sud de la ligne 4 s’est heurtée aux arbitrages budgétaires. Pourtant, depuis l’arrêt Bagneux – Lucie Aubrac, mise en service fin 2022, les élus plaidaient pour une suite logique : soulager le RER B en réinjectant ses usagers sur un métro plus fiable. Ce mercredi, Philippe Tabarot a formellement confirmé qu’il soutenait « le dossier, dans sa version initiale jusqu’à Châtenay-Malabry (tram T10) », mais aussi « dans sa version jusqu’à la gare de Massy-Palaiseau ». Autrement dit, même la branche TGV pourrait voir débouler des rames automatiques sous quelques années.
Une association longue comme un jour sans grève
Fondée en janvier 2023, l’Association des villes et des élus pour le prolongement sud de la ligne 4 réunit les maires de Montrouge, Antony, Bagneux, Châtenay-Malabry, Fontenay-aux-Roses, Bourg-la-Reine, Sceaux, Verrières-le-Buisson… et bientôt Massy. Depuis l’inscription du projet au CPER 2023-2027 pour financer une étude de faisabilité jusqu’à Châtenay-Malabry, les réunions se sont succédé, les pétitions ont récolté des milliers de signatures et les communiqués ont fusé. Mais sans le soutien de l’État, rien n’avance : il a fallu la pression médiatique et politique pour décrocher ce précieux appui.
Tracé et connexions : mode d’emploi
Concrètement, la prolongation partirait du terminus souterrain de Bagneux – Lucie Aubrac, filer sur 1,5 km sous la ville, puis s’emparer de l’actuel tracé de la branche Bourg-la-Reine – Robinson du RER B. Cette section, redeviendrait métro, avant de poursuivre sous Châtenay-Malabry pour rejoindre le tram T10 et desservir enfin Massy-Palaiseau. L’effet attendu ? Un allègement du RER B (suppression de sa branche Robinson), une fréquence montée à un train toutes les 90 secondes en pointe, et une connexion directe au TGV pour les banlieusards esseulés.
Un projet à bas coût, qui fait mouche
Les élus ne cessent de vanter le rapport performance-prix de la manœuvre : pas de grands viaducs ni de ponts hors de prix, mais une conversion intelligente d’infrastructures existantes. Cette sobriété budgétaire a permis l’inscription, dès décembre 2023, au Schéma directeur d’Île-de-France – environnemental (SDRIF-E) puis au CPER. Résultat, l’étude – dont l’enveloppe avoisine quelques millions d’euros – doit démarrer très prochainement, en tandem avec une quinzaine d’autres prolongements de métro francilien lancés par Île-de-France Mobilités. Une vraie victoire pour ceux qui en avaient marre de subir des embouteillages RER.
Quand la banlieue hurle sa soif de métro
J’y vois un symbole fort : la banlieue sud, longtemps reléguée au second plan, se rebiffe. Entre résidents énervés par les retards chroniques du RER B et cadres pressés de gagner la gare TGV, la colère bout sous les pavés. Et si ce projet aboutit, ce sera un coup de tonnerre politique : démontrer qu’un métro de surface n’est pas le seul modèle, et que le sous-sol peut encore réserver des surprises. De mon côté, j’attends de voir les plans d’études, mais je parie déjà que ce tracé – fait de vieux tunnels et de conversion de rails – sera plus rapide à réaliser qu’une nouvelle ligne.
Risques et fantasmes sous la station
Bien sûr, tout n’est pas rose. La suppression de la branche Robinson fait grincer les dents des Verriérois, inquiets de perdre un accès direct au centre via la gare du RER B. Le CARRRO (Collectif des riverains du RER de Robinson) a déjà fait savoir qu’il préférait un renforcement du RER B plutôt qu’une mutation en métro, jugeant les travaux trop longs et la correspondance trop contraignante. Et côté budget, gare aux « coûts cachés » (renforcement des stations, conversion des quais, mise à niveau des équipements). Mais face à la déroute du RER B, même les plus sceptiques commencent à envisager que le métro puisse être la moindre des enfers.
L’heure de vérité approche
Mercredi prochain, Île-de-France Mobilités, la Région et la préfecture lanceront le comité de lancement des études pour une quinzaine de lignes. Le sort de la ligne 4 sud se jouera derrière des tables rondes poussiéreuses, des rapports d’experts et des réunions publiques soporifiques. Mais si l’on en sort avec un calendrier bétonné, cela pourrait bien redessiner la physionomie de la banlieue sud d’ici à 2035.
Pour ma part, même si j’aime détester les chantiers interminables, je trépigne déjà à l’idée de monter dans un métro direct vers la gare TGV, le téléphone à la main, prêt à filer vers Bordeaux ou Lyon sans m’arracher une correspondance. Voilà qui redonne un peu de piment à nos RER vieillissants.