Une plongée dans l’art déco
Inauguré en 1898 sous le nom de La Fermette Marbeuf, l’établissement affiche depuis 1983 un statut de Monument Historique qui n’a rien d’anodin : imaginez une verrière ciselée de tuyaux de fer forgé, des céramiques aux motifs végétaux et des fresques murales à faire pâlir d’envie toute serre tropicale. Après une restauration chirurgicale en 2018, les lustres en verre laiteux et les boiseries bordeaux ont repris vie, comme ressuscités d’un faste Belle Époque que seuls les snobs du 8ᵉ osaient encore évoquer. Aujourd’hui, chaque table y est un trône, chaque assiette un trophée — et l’ensemble a même raflé une place dans le top des plus beaux restaurants mondiaux lors des Restaurant & Bar Design Awards 2019.
Une aventure gustative hors normes
Si vous pensez que la surprise s’arrête au décor, vous vous fourrez le doigt dans l’œil — et dans le beurre. Le menu de BeefBar se déploie comme une carte postale de révolution gastronomique : gyozas fourrés au bœuf de Kobe, tacos de bœuf Angus, côtes de bœuf maturées… Chaque bouchée claque comme un uppercut envoyé aux palais trop habitués au tofu insipide. Les amateurs de viande pure et dure y trouveront leur bonheur, tandis que les novices, attirés par l’aura branchée du lieu, se découvrent soudain magnétiquement fascinés par la tendreté inouïe d’une côte découverte.
Des viandes triées sur le volet
Chez BeefBar, la viande n’est pas un simple ingrédient : c’est un état d’esprit. Les éleveurs se bousculent pour figurer dans leur carnet d’adresses, qui ressemble plus à une liste VIP d‘experts carnassiers qu’à un banal annuaire professionnel. Kobe, Angus, Wagyu japonais : chaque morceau est évalué selon des critères presque obsessionnels — persillage, jutosité, fragrance. Cette quête de l’excellence a valu au restaurant d’être sacré meilleur steakhouse du monde en 2023 par le World’s 101 Best Steak Restaurants, un palmarès où la France tient rarement le haut du pavé. Passer à côté de cette expérience, c’est comme décliner une invitation au Bal des Vampires de Roman Polanski : impensable et légèrement intimidant.
Un lieu chargé d’histoire
Au-delà du filon juteux de la viande, BeefBar séduit par sa dimension historique : on y ressent encore le souffle de la Belle Époque, époque où les salons feutrés bourdonnaient de discussions sur les tout premiers tours de la Tour Eiffel. Ici, on vient autant pour se faire voir que pour se faire péter la panse, un paradoxe élégant que seuls les Parisiens savent apprécier. À la nuit tombée, la lumière tamisée fait scintiller les mosaïques, et l’on se surprend à chuchoter, comme dans un temple secret où l’on ne blasphème qu’à propos du manque de sel.
Une renaissance millésimée
La réouverture de 2018 n’a pas seulement redonné un coup de jeune à la salle ; elle a réinjecté un zeste de folie contemporaine dans un cadre patrimonial. Les mixologues y rivalisent d’inventivité, proposant des cocktails aussi surprenants que destructurés, à base de fumée de hêtre ou d’infusions de basilic thaï. Chaque verre devient un prolongement sauvage de l’assiette, rappelant que chez BeefBar, la révolution ne se limite pas à la viande.
Tracer sa route jusqu’à BeefBar, c’est choisir de lâcher prise sur les conventions pour entrer dans une pièce où le temps s’est arrêté tout en dévorant l’avenir. Vous voilà prêts à tester le mariage explosif entre faste ancien et audace culinaire contemporaine : une parenthèse scandaleusement jouissive, garantie sans clichés.
Vous ressortirez avec l’impression d’avoir traversé un roman graphique, le palais saturé de glamour carné et l’irrésistible envie de raconter votre odyssée gustative à quiconque daignera vous prêter une oreille. Plongez tête la première, car ici, on ne mâche pas ses mots — et encore moins ses morceaux.