Un hommage brutal et symbolique
Le 15 octobre 2024, boulevard Malesherbes, un SUV a fauché Paul Varry, 27 ans, après une altercation. À l’époque, on a parlé d’accident, puis de « drame », avant qu’Anne Hidalgo ne tranche : c’était un assassinat. C’est sous ce signe qu’a eu lieu l’inauguration au Musée des Arts et Métiers, en présence de la famille, d’élus comme Ariel Weil, maire de Paris Centre, et de militants cyclistes. Une plaque à son nom, mentionnant « militant du vélo » et sa date de naissance, trône désormais fièrement, presque tel un défi lancé aux 4×4 récalcitrants.
Une révolution douce-amère
Quand Ariel Weil appelle à une “véritable révolution” des transports, il n’y va pas avec le dos de la cuillère. Entre les lignes, c’est un bras d’honneur aux nostalgiques du bitume. 20 % de la chaussée dédiés aux cyclistes, c’est encore trop pour certains, mais suffisant pour bouleverser la donne. En plein cœur de Paris, voir des casques accrochés aux ceintures plutôt qu’à la poignée de porte d’un SUV, c’est un peu comme ressentir pour la première fois que la ville peut respirer autrement.
Une maire en roue libre
Anne Hidalgo ne vient pas pour enfiler des perles. Pour elle, la mort de Paul Varry est la conséquence logique d’une société qui a organisé ses rues pour les bagnoles. Son mot d’ordre : réduire la place de l’auto au profit des piétons et des vélos. À chaque bouchon qu’elle fait sauter, chaque piste qu’elle trace, elle martèle qu’“il y a des violences automobiles tous les jours” et qu’on ne peut plus les laisser filer sous le tapis de bitume. Elle pousse même l’absurde : un Paris sans SUV, proscrits depuis la motion du 22 novembre 2024, un fantasme ? Peut-être. Mais quand on y pense, c’est tout sauf une utopie.
Quand la colère se pédale
David Belliard, l’adjoint écolo en charge des mobilités, vit son engagement jusqu’au bout des rayons : il roule à vélo dans le chaos quotidien. Son credo : “qu’un enfant puisse faire du vélo en toute sécurité.” Pas de baratin ici, juste la vérité de ceux qui gardent la trace des coups de guidon sur l’asphalte. Connaissant les angles morts des gros 4×4, il ne veut plus de ces machines à écraser dans nos rues. Objectif 2026 : réduire encore de 50 % la circulation auto. Bingo ? On n’est pas à l’abri d’un souci mécanique, mais le message est clair.
Du militantisme griffonné sur le macadam
Le 9 juillet 2025 restera gravé comme une première : jamais un vélo n’avait eu droit à son totem pavé. Paul Varry, qu’on fredonne désormais en criant “plus de pistes !”, incarnait ce combat depuis ses débuts. Membre actif de Paris en selle, il passait ses week-ends à arpenter les rues, à coller des stickers, à distribuer des gilets fluo. Pour lui, chaque bande cyclable était un pas vers “une ville civilisée”. Sa mémoire, plantée dans le béton de Réaumur, promet de parler tous les jours aux millennials, Gen Z et co., ces générations prêtes à laisser la pollution dans le rétro.
Un futur à deux-roues
Le décor est planté : Paris veut passer en mode cyclable. Les piétons jubilent, les automobilistes grincent. Tant mieux. Les chiffres sont là : en cinq ans, le nombre de cyclistes a explosé de plus de 40 %, tandis que la part modale de la voiture fond comme neige au soleil. Anecdote : l’autre jour, j’ai vu une grand-mère en fixie, presque un oxymore, filer devant un embouteillage de SUV, bras levés, sourire aux lèvres. C’est le visage même de la révolution douce qui claque.
Une balade qui mord
Si vous passez rue Réaumur, arrêtez-vous. Touchez la plaque. Lisez la date : 15 octobre 2024. Sentez la rage et l’espoir qui suintent du bitume. Paul Varry n’est pas qu’un nom : c’est un braille urbain contre la brutalité routière. Et si vous hésitez encore à sauter sur un two-wheel, respirez un bon coup : ici, la ville vous tend une main… cycliste, à condition de savoir lâcher le volant.
Paris change, Paris roule, Paris se réinvente. Et au bout de chaque parcours, on devine l’ombre de Paul Varry, souriant derrière son casque. Essaie, toi aussi, le frisson de la liberté sur deux roues ; tu verras, c’est contagieux, et ça brûle moins de carburant que ta vieille caisse.