Une visite aux allures de tournant historique
C’est dans un contexte de reconstruction post-Assad que le nouveau président syrien, issu d’une coalition islamiste, met le pied à Paris. Emmanuel Macron, qui avait dégainé l’invitation dès début février, a posé ses conditions fin mars : constitution d’un gouvernement inclusif et garanties solides pour assurer la sécurité du pays. Un pari osé, qui, selon certains, ressemble à une partie d’échecs où chaque pion diplomatique pèse son poids de méfiance. Pour ma part, je trouve surprenant que la France joue enfin la carte de la ruée vers Damas, alors que nombre d’alliés internationaux restent sur la réserve.
Un soutien français sous conditions
Au cœur de ce tête-à-tête, Macron va redire son soutien à la « construction d’une nouvelle Syrie, libre, stable et souveraine ». Traduction : Paris réclame un plan clair pour stabiliser le Levant et, surtout, freiner l’extension des conflits au Liban voisin. On imagine la scène : deux hommes en costard, l’un brandissant la carte de la démocratie, l’autre tentant de rassurer sur la protection des minorités. D’un œil critique, j’y vois surtout un numéro d’équilibriste où la France tente de se donner bonne conscience tout en préservant ses intérêts géopolitiques.
Des voix discordantes dans l’hémicycle français
Avant même son arrivée, cette visite a fait grincer des dents. Marine Le Pen fulmine, dénonçant la réception d’un « djihadiste autoproclamé ». Du même tonneau, Éric Ciotti crie à la « reconnaissance » d’un régime « abominable ». Sans verser dans la charogne politicienne, on comprend que l’opposition se saisisse de l’affaire comme d’un boulet. Perso, je me marre devant ces invectives : c’est un jeu de rôles où chacun joue sa partition pour rallier son électorat. Mais faut-il vraiment sacrifier une opportunité de dialogue au nom d’un principe absolu ?
Les défis sécuritaires toujours en suspens
Jamais très loin des salons dorés, la réalité du terrain se rappelle à nous. En mars, l’ouest de la Syrie a tremblé sous des massacres ayant fait 1 700 morts, principalement de la communauté alaouite. Des affrontements récents ont aussi éclaté avec les Druzes, tandis que des ONG dénoncent sévices et exactions de combattants affiliés. Sans langue de bois, je vous le dis : inviter al-Chareh, c’est accepter de marcher sur un champ miné, avec la crainte constante que des extrémistes profitent des brèches du pouvoir pour aggraver la crise humanitaire.
Israël, facteur d’escalade régional
Comme si la situation n’était pas déjà assez explosive, Israël a relancé ses frappes en Syrie. Une attaque récente a visé un secteur tout près du palais présidentiel de Damas, envoi d’un « message » clair aux autorités syriennes selon Tel-Aviv. La riposte a fusé : Damas parle de « dangereuse escalade », l’ONU implore un cessez-le-feu immédiat. Dans tout ce vacarme, on peut se demander si la diplomatie parisienne a vraiment les moyens de calmer les ardeurs belligérantes. Pour moi, c’est un coup de poker géostratégique où chaque camp joue son va-tout.
Le grand jeu des sanctions et de la réhabilitation
En filigrane de cette visite, flotte la perspective d’une levée partielle des sanctions imposées à Damas sous Bachar al-Assad. La France, en ouvrant son salon doré, envoie un signal fort aux marchés : la Syrie peut renaître de ses cendres, pourvu qu’elle se plie aux exigences de la communauté internationale. À ce stade, je reste dubitatif : comment bâtir un État de droit lorsque la légitimité politique est encore plus fragile que le moral des civils qui survivent sous les bombes ?
Paris, vitrine d’une diplomatie tous azimuts
La capitale se pare de ses plus beaux atours pour sceller ce pacte fragile. Entre les portraits officiels, les poignées de main solennelles et les communiqués précautionneux, l’Élysée espère convaincre que la France est un pilier de la paix mondiale. Mon soupçon ? C’est surtout une opération de communication musclée, destinée à redorer le blason de la diplomatie française. Vous me direz, après tout, la politique n’est-elle pas avant tout l’art du possible ?
Quand les accords tomberont, restera la réalité : un pays mis à genoux, des minorités à protéger et des promesses à tenir. Al-Chareh repartira-t-il avec un chèque en blanc ou avec l’assentiment conditionnel d’une Europe sceptique ? C’est là que tout se joue, entre jeu de dupes et espoir de renouveau.
En ouvrant cette parenthèse historique, Paris se positionne en médiateur central, flanqué de sa prétendue impartialité. Mais, au fond, qui va vraiment payer l’addition ? Les Syriens, d’abord. Et, en filigrane, nous-mêmes, en tant que témoins passifs ou acteurs intrigués d’une page d’histoire en train de s’écrire. Car, au bout du compte, cette visite est une invitation au débat : faut-il privilégier la rupture ou miser sur la réconciliation ? Moi, je parie sur le chaos organisé, mais je n’en oublie pas mon désir d’un lendemain plus stable.