L’heure des adultes a sonné
Imaginez un monde où la jeunesse française est convoquée à rentrer chez elle avant même que le soleil ne disparaisse derrière l’horizon. Un monde où les soirées prolongées à traîner avec les copains deviennent l’équivalent moderne du mythe de Sisyphe, une quête absurde dans un paysage urbain déserté après 22 heures. Pas besoin d’aller chercher votre DeLorean et de mettre le cap sur une dystopie : Gérald Darmanin, notre cher ministre de l’Intérieur, a décidé que c’était déjà notre réalité. Ou du moins, il veut que ça le soit.
Le coup d’envoi a été donné à Pointe-à-Pitre, où les étoiles sont désormais les seules témoins des aventures nocturnes des mineurs. L’idée fait tache d’huile et s’infiltre dans les agendas politiques locaux comme un vieux refrain des années 80 : répétitif et un peu lassant.
Quand le couvre-feu se fait couverture médiatique
Quoi de mieux qu’une petite mesure répressive pour calmer les esprits échauffés à l’approche des élections européennes ? C’est bien connu, rien ne rassure plus l’électorat que de savoir que la jeunesse est sous clé après le dîner. D’après Darmanin, nos chères têtes blondes doivent être « chez elles, chez leurs parents ». Pourquoi ? Parce qu’évidemment, un adolescent ne peut être que diaboliquement occupé à fomenter des plans pour déstabiliser la République dès qu’il dépasse l’heure légale du goûter.
Béziers, Nice, Pennes-Mirabeau… la liste s’allonge, comme le nez de Pinocchio chaque fois qu’un politique promet que c’est pour notre bien. Et la jeunesse ? Elle s’adapte, comme toujours, trouvant de nouvelles manières de résister ou d’ignorer ces directives venant d’en haut.
Les vrais enjeux derrière les couvre-feux
Ne nous leurrons pas, cette histoire de couvre-feu n’est qu’une pièce dans le grand puzzle de la « sécurité publique », où chaque pièce semble désespérément chercher sa place. Le problème avec les jeunes n’est pas qu’ils traînent dehors, mais plutôt qu’ils manquent de repères, d’opportunités, d’écoute. Quand le chômage des jeunes flirte avec les sommets et que l’éducation crie au secours, nos dirigeants brandissent l’arme du couvre-feu. Ironique, n’est-ce pas ?
Que reste-t-il à faire ?
Révolte ? Résignation ? Non, conversation. Il est temps de parler de réformes sérieuses qui ne se limitent pas à enfermer la jeunesse, mais à l’engager, l’éduquer et l’écouter. Des solutions existent : programmes d’emploi, espaces de création et de dialogue, éducation à la citoyenneté qui va au-delà du vieux manuel poussiéreux d’histoire.
Darmanin et compagnie pourraient apprendre une ou deux choses de ces jeunes qu’ils cherchent à confiner : l’audace, l’innovation, et peut-être même un peu de cette vieille magie appelée espoir. Car au fond, ce n’est pas en éteignant les lumières qu’on fait disparaître les problèmes, c’est en allumant des torches pour éclairer les chemins à venir.
Alors, avant de nous dire à quelle heure rentrer chez nous, assurez-vous de nous avoir donné une bonne raison de vouloir y rester.